gael prevost jo2012Grand espoir du tir à l'arc pour la Coupe du monde, Gaël Prévost fuit les ondes électromagnétiques comme la peste. A 19 ans, il ne possède ni téléphone mobile, ni ordinateur. Portrait d'un garçon hors du temps. Article de Sylvie Marchal paru dans Le Parisien le 19 septembre 2013

Si Gaël Prévost devient le deuxième champion olympique français de tir à l'arc à Rio en 2016, il ne recevra aucun message de félicitations. Ni texto, ni MMS, ni compliments sur sa boîte vocale. Rien. Il n'a pas de téléphone mobile.

 

« Un portable, c'est la dernière chose que j'achèterais », jure l'archer. A 19 ans, le grand Gaël – 1,94 m – en est convaincu, les ondes électromagnétiques émises par les appareils électroniques sont nocives.

Alors que la plupart de ses camarades passent leur temps les yeux rivés sur un écran, lui s'occupe autrement. « Je viens de terminer de lire La Tulipe noire, c'était très bien », déclare le pensionnaire de l'Insep (Institut national du sport, de l'expertise et de la performance), qui aime Alexandre Dumas et Edgar Allan Poe.

Dans sa chambre à Vincennes, nul ordinateur ou télévision. « Il est d'une grande maturité par rapport à son âge, assure son entraîneur, Marc Dellenbach. C'est assez étonnant dans la société actuelle. »

Lorsque Gaël est arrivé à l'Insep en 2009, à seulement 15 ans, il s'est d'abord fait charrier. « Il paraissait un peu sauvage au début, témoigne son coéquipier Jean-Charles Valladont. Il ne connaissait pas certaines choses qui nous semblaient banales. »

Le téléphone portable est un objet dont il ne s'est jamais servi. « C'était un peu plus compliqué au quotidien, parce que si un entraînement était décalé d'une demi-heure, on ne pouvait pas l'avertir par SMS », se souvient le champion olympique Sébastien Flute, qui a préparé les Jeux olympiques de Londres avec lui.

Fils d'un agriculteur et d'une mère au foyer, Gaël Prévost tient sa conviction de sa maman. D'origine serbe, Nada est elle aussi « électro-sensible » depuis qu'elle a été « irradiée » avec sa fille par un petit appareil de relevé de compteur d'eau à distance il y a six ans. Il avait été posé à leur insu tout près de leur maison, pourtant située dans un lieu reculé, près du petit village de Saint-Gervais-sous-Meymont (Puy-de-Dôme).

« Nous avions des maux de tête, des insomnies. J'ai même été emmenée à l'hôpital parce que je faisais de la tachycardie », raconte cette maman de trois enfants, ancienne... informaticienne.

Des ondes qui altèrent la performance

Depuis l'incident, Nada a coupé l'électricité dans sa maison. La famille Prévost s'éclaire uniquement à la bougie de cire d'abeille. Elle s'est aussi beaucoup rapprochée du Criirem (Centre de recherche et d'information indépendant sur les rayonnements électromagnétiques non ionisants). Elle veille aujourd'hui à ce que son fils, scolarisé depuis le lycée seulement, évite les ondes pour rester en bonne santé. « Partout où il est passé, j'ai submergé les directeurs de courriers pour les informer de ce danger », raconte Nada.

A l'Insep, elle a fait en sorte que le Wi-Fi ne soit pas installé dans le bâtiment des mineurs où réside Gaël et que les antennes-relais de téléphonie mobile soient éloignées du site. Elle a aussi obtenu que les portables soient éteints quand les athlètes tirent. Pour elle, les performances sportives de son aîné sont dépendantes inévitablement de « la pollution électromagnétique » des lieux.

Trop de portables, des antennes à proximité et le résultat de Gaël sera altéré. « Je suis encore inquiète quand il est en déplacement, car il est tributaire de l'environnement. » Pour cette finale de Coupe du monde à Paris, elle a déjà averti les organisateurs.