eternit3La condamnation des deux anciens dirigeants d'Eternit à Turin, le 13 février dernier, basée sur leur responsabilité de la mort d'environ 2900 personnes en Italie, nous fait réfléchir.

Selon les journalistes de la RSR c'est bien la première fois qu'un haut dirigeant d'une entreprise importante est condamné pénalement par des juges en Europe. Le Professeur François Iselin de l'EPFL relativise cette affaire. Interviewé par la RSR, il a déclaré que le nombre de victimes de l'amiante dans le monde est probablement 10 fois plus élevé et que certains pays continuent à produire de l'amiante en toute impunité !

Ce qui est particulièrement troublant dans cette affaire, c'est que les dirigeants d'Eternit étaient au courant de la dangerosité de l'amiante, et cela depuis presque 50 ans. Ils ont nié et minimalisé le problème sans prendre suffisamment de mesures pour protéger leurs ouvriers. Le professeur Iselin pense que tout produit potentiellement cancérigène doit être réglementé beaucoup plus strictement. Apparemment, l'industrie n'a pas assez d'éthique pour s'autoréguler. Selon le professeur, les problématiques des nano particules, les OGMs, la radioactivité, les téléphones portables, etc. se trouvent tous dans le même panier que l'amiante. Mais qui sont les vrais coupables ?

L'industrie

Bien sûr les dirigeants de l'industrie sont les premiers coupables parce qu'ils mettent, sans limites, des produits potentiellement cancérigènes sur le marché. Ils maintiennent sans rougir que les preuves relatives à la dangerosité de leurs produits ne sont pas suffisantes. Pour l'industrie de la téléphonie mobile, un mensonge perdure: "aucun rapport de cause à effet entre l'exposition au rayonnement et la santé n'a pu être établi". Le consommateur se croit à l'abri de tout danger, tout comme les ouvriers d'Eternit en Italie. En réalité, les industriels connaissent la vérité. En tout cas les compagnies d'assurances la connaissent puisque depuis longtemps elles n'assurent plus les risques liés à la pollution électromagnétique.

La science

Et bien sûr la science est au courant depuis longtemps. En ce qui concerne l'amiante, les premiers rapports scientifiques sur les effets cancérigènes datent des années soixantes. Néanmoins, plusieurs pays comme le Canada, le Brésil et l'Inde continuent de produire de l'amiante en niant sa dangerosité. Heureusement qu'il existe des personnalités comme le professeur Iselin qui osent franchement aborder le sujet en public. Lors de son interview avec la RSR, ce dernier a relevé que l'information scientifique est "restée cantonnée dans les rubriques scientifiques que personne ne lit et qui n'ont strictement aucun effet politique, syndical ou économique... ". Le fait que la science dépende largement de la finance de l'industrie affaiblit certes encore davantage la position des scientifiques.

Le Gouvernement

La vague de libéralisme poussée à l'extrême continue à affaiblir les gouvernements et les pouvoirs politiques. En Suisse, les partis politiques sont infiltrés par les intérêts économiques et la plupart des politiciens ménagent leur image en évitant les mesures impopulaires qui pourraient compromettre leur élection. Pourtant nos politiciens semblent au courant de la problématique de l'électrosmog. Lors d'une enquête auprès des candidats aux élections de 2011, menée par l'Association faîtière électrosmog Suisse et Liechtenstein, plus de 90% d'entre eux ont répondu "Oui" à la question : "Le public devrait-il être mieux informé sur les risques potentiels de l'électrosmog pour la santé ?". Bien sûr ce chiffre n'est pas tout-à-fait représentatif étant donné que nombre de candidats n'ont pas répondu à l'enquête. Il est vrai que les normes suisses réglementant les niveaux de radiation sont plus strictes que celles de beaucoup de pays européens. En réalité ces normes sont inadaptées parce que les pathologies apparaissent à des niveaux bien inférieurs. En plus le respect de ces normes est trop peu contrôlé sur le terrain. Pendant ce temps-là, les industries, les juges et les médecins continuent à se référer à ces normes inadaptées laissant les victimes de l'électrosmog dans une situation de désarrois, sans réelle possibilité de recours. Les récents programmes de recherches sur les effets sur la santé, financés par le gouvernement suisse, n'ont malheureusement pas été menés dans une stricte objectivité. Et pourtant ces recherches ont confirmé quelques observations alarmantes.

Vous et moi

Oui, vous et moi, sommes également coupables. Je n'aime pas le mot "consommateur" car il me fait penser à un glouton, sans cerveau et sans volonté. Pourtant les consommateurs "votent avec leur porte-monnaie". Vous et moi, pouvons privilégier l'achat de produits sains en évitant tout produit dangereux. Pourtant nous sommes trop souvent tentés par des objets de prestige et finalement souvent peu utiles. Comme l'a écrit l'économiste australien Clive Hamilton : "Les gens achètent des choses dont ils n'ont pas besoin, avec de l'argent qu'ils n'ont pas, pour impressionner des gens qu'ils n'aiment pas". Où se trouve donc le bonheur dans cette logique de glouton? Oui, moi, l'auteur de cet article, j'ai également ma part de culpabilité. Je suis un Geek (un passionné d'informatique et de technologies) et je fus l'un des tout premiers à adopter les nouvelles technologies. Jusqu'au jour où, il y a deux ans, un ami électrosensible est décédé d'une tumeur au cerveau. Je suis toujours un passionné mais j'évite d'être un glouton.